Publié par Une enquête menée par La Maison Des Reporters a mis en lumière l’existence d’une vidéo confidentielle, à laquelle on n’a pas eu accès, révélant les actes de torture infligés à l’activiste sénégalais Pape Abdoulaye Touré par des gendarmes. La vidéo, d’une durée de deux minutes, montre Touré blessé, le visage ensanglanté, entouré de gendarmes. Certaines images de cette séquence, devenues virales, ne rendent qu’imparfaitement compte de la brutalité de la situation.
Dans cette vidéo, on voit Pape Abdoulaye Touré implorer un certain « Chef Sow », demandant : « Chef Sow, est-ce que je peux parler ? ». La réponse entendue dans la pièce fut sans équivoque : « Brisez-lui les jambes ». La torture incluait l’utilisation d’un mélange de sable et d’eau visant à accroître la douleur. Touré raconte : « Ils m’ont fait coucher dos au sol avant de me verser de l’eau au visage. J’ai failli me noyer ».
Libéré le 15 février grâce à un assouplissement politique après neuf mois de détention, ni les preuves de son traitement ni ses graves blessures n’ont facilité sa libération plus tôt. Touré avait été arrêté dans un contexte de troubles à Dakar, suite à la condamnation de l’opposant Ousmane Sonko. Intercepté par des hommes se réclamant d’un politicien du gouvernement, ils l’avaient menacé : « C’est la dernière fois que tu parleras », avant de le traîner vers un véhicule.
Sauvé par l’intervention d’un gendarme à proximité, Touré avait été emmené dans une caserne où son calvaire avait continué. Accusé à tort d’inciter à la violence, il avait tenté de prouver son innocence. Cependant, la découverte d’une photo de l’opposant Sonko sur son téléphone avait aggravé sa situation, le « Chef Sow » lui lançant : « Je te reconnais […] Tu fais partie des boys de Sonko ».
Les sévices avaient entraîné un certificat médical attestant d’une incapacité temporaire de travail de 90 jours. Me Moussa Sarr, avocat de Touré, exprime son indignation face à la violence subie par son client : « En 23 années de barre, j’en ai vu des violences policières, mais lui, il a échappé à la mort ».
Malgré sa libération, les conséquences de cette période sur sa vie sont profondes, affectant à la fois sa santé et sa carrière académique. Touré, ayant manqué d’importantes échéances universitaires, se considère comme victime d’un acharnement difficile à comprendre, se demandant : « Parfois, je me pose cette question : ‘Suis-je réellement un Sénégalais ?’ à cause de tout cet acharnement que je n’arrive pas à comprendre ».
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