Drame à Kounoune – Réaction de l’époux : « Je ne peux pas avoir une maison et accepter que ma mère n’y habite pas »

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L’image d’une localité paradisiaque, Kounoune (département de Rufisque) a pris un sacré coup avec la mort de Khady Diouf, une vieille dame, découverte atrocement tuée, le corps brûlé aux trois quarts. Sa belle-fille, présumée auteur de ce meurtre, a été arrêtée et placée en garde à vue à la gendarmerie de Sangalkam. L’Obs y a enquêté pour savoir comment tout cela est arrivé.

Il y a quelques jours, Kounoune était un havre de paix. Cette localité perdue entre les limites des départements de Pikine et Rufisque, était surtout connue pour son attrait pour les Dakarois et Pékinois, trop à l’étroit dans leurs maisons exiguës, fuyant la promiscuité. Les cambriolages y sont très rares et jusqu’ici, aucun crime n’avait été recensé dans les différentes cités qui la composent. Jusqu’à vendredi dernier, où tout s’est brusquement écroulé. 24 heures après le drame qui a arraché bien des larmes à ses habitants, le silence règne à présent à la Cité Air France de Kounoune sise dans la commune de Sangalkam du département de Rufisque. Dans les rues, les visages sont encore marqués par la tristesse. Pourtant, certains ne semblent pas trop surpris par ce qui est arrivée à Khady Diouf, une vieille dame qui a vu le jour le 02 janvier 1951 à Dougar : « C’est ce qui est écrit sur sa carte nationale d’identité », informe le délégué de quartier, l’un des tout premiers à s’installer dans cette cité, sortie de terre en 2005 et qui compte 240 maisons. Gendarme à la retraite, le Major Ibrahima Ndiaye (c’est le nom du délégué de quartier de la Cité Air France) qui veille désormais sur les 1404 âmes que compte la cité Air France, connaît bien l’histoire de la famille Bâ, du nom du seul fils que la dame Khady Diouf a eu avant que son époux ne le précède dans l’au-delà. Une histoire qui a démarré il y a plusieurs années, par un rêve. Celui d’une dame, Khady Diouf, de trouver chaussure au pied à son unique fils, en lui cherchant une épouse issue de son ethnie. Et pour cela, Khady Diouf n’a pas cherché loin. Grand- mère, elle a su convaincre les parents de sa petite-fille, Souado Ndiaye. « Elle a choisi Souadou Ndiaye toute jeune pour en faire la future épouse de son fils ». A l’époque, ce fils, du nom d’Abdoulaye Bâ, son unique fils, ex auxiliaire gendarme, s’était reconverti dans le business avec succès.

Un succès tel que ses affaires devenues florissantes, Abdoulaye Bâ amasse beaucoup d’argent et construit une belle villa à la Cité Air France. Il fera ainsi venir sa maman de son village natal, Dougar, qui à son tour, se fait accompagner par sa petite-fille, Souadou, qu’elle inscrit dans un établissement scolaire à Rufisque, puis « dans une école privée », témoigne un voisin. Pendant que la fille grandissait sous le regard attendrissant de la vieille Khady Diouf, Abdoulaye Bâ, l’unique fils, brillant dans le business qu’il exerçait, ne rencontre pas la même réussite avec les femmes. « Ses deux ménages ont fait long feu », se rappelle le délégué de quartier. Deux échecs qui l’ont poussé à davantage se consacrer à ses affaires florissantes, jusqu’à ce que sa mère le convainc de prendre une nouvelle épouse en la personne de Souadou, sa petite-fille. « Elle voulait surtout que la réussite de son fils profite à ses proches, en plus de donner Souadou en mariage à son fils, Khady Diouf a fait venir de son village, Dougar, d’autres membres de la famille, dont des neveux de son fils Abdoulaye », témoigne Khady Ndiaye Tall, une voisine, une vieille dame, amie de Khady Diouf, une amitié née à Touba et qui s’est poursuivie à la Cité Air France où toutes les deux personnes du troisième âge, ont rejoint les domiciles de leurs fils respectifs. C’est ainsi que le mariage entre Abdoulaye Bâ et Souadou Ndiaye est célébré avec la bénédiction de Khady Diouf 69 ans, qui pensait ainsi qu’elle allait passer ses vieux jours entourée de son fils, Abdoulaye, sa belle-fille Souadou et certainement de ses petits-fils. Tout se déroulera comme prévu, jusqu’à la naissance du premier enfant de Souadou. Puis tout s’écroule brusquement.

«Elle convainc son époux à expulser ses proches de la maison…»

Comme dans un plan machiavélique, Souadou va remporter haut la main, le premier bras de fer avec son époux. A la Cité Air France, on s’en souvient encore. C’était il y a quelques années. En colère pendant plusieurs jours, Souadou Ndiaye s’en prend violemment aux neveux et autres parents de son mari venus habiter avec eux dans la maison. Des accès de colère terribles qui ont amené son époux à faire partir ceux-ci de la maison, un bâtiment R+1. Ces derniers partis, elle aménage à l’étage avec son enfant et son époux, qui d’ailleurs, est toujours entre deux avions pour les besoins de son business, alors qu’au rez-de-chaussée, la vieille Khady Diouf vit presque recluse avec une fille âgée de 09 ans. « C’était une autre de ses petites-filles, épargnée par la colère de sa belle-fille Souadou », selon un voisin.

«Elle verrouille portes et fenêtres, menace avec un pilon, les voisins qui l’ont trouvée assise à califourchon sur sa belle-mère, qu’elle a rendue sourde»

Après ce premier accrochage avec les parents de son mari qu’elle a réussi à faire partir de la maison, Souadou a désormais les coudées franches pour régner en unique maitresse dans la maison. Elle confine la vieille au rez de chaussée et l’utilise souvent pour déverser sur elle son trop plein de colère. Les voisins, de la rue, se rendent vite compte que les disputes entre l’époux, Abdoulaye Bâ et son épouse sont fréquents. Et chaque fois, c’est la vieille dame qui paie les pots cassés. « Chaque fois qu’elle est en colère contre son époux, elle se retourne contre sa belle-mère dès que le mari se rend au boulot », raconte un voisin, qui confie qu’à la Cité Air France, plus personne n’était surpris lorsque des disputes violentes éclataient entre les deux époux. Une situation devenue stressante pour la vieille Khady Diouf, jusqu’à ce qu’arrive l’année 2019, où elle découvre enfin le véritable visage de sa bru, Souadou. C’était en début d’année, l’époux se trouvait à l’Étranger, voyageant entre la Norvège, la Belgique et les États-Unis. Dans la maison, souadou verrouille les portes et les fenêtres, puis tout va très vite. Elle débarque au rez de chaussée et fonce dans la chambre de sa belle-mère, se jette sur elle et fait abattre une pluie de coups violents sur la pauvre dame. Tétanisée, présente dans la chambre de sa grand-mère, la petite fille de Khady Diouf, âgée de 9 ans, réussit à se hisser à la fenêtre pour hurler et alerter les voisins. Une voisine du nom de Khady Ndiaye Tall, arrivée la première sur les lieux, raconte : « Elle ne pensait pas que la petite fille de neuf ans pouvait alerter les voisins. Quand nous sommes arrivés, nous avons réussi à ouvrir la porte, elle nous a certainement entendus arriver, mais elle a continué à s’acharner sur la vieille. Nous l’avons trouvée à califourchon sur la dame et quand nous l’avons tirée pour sauver sa belle-mère, Souadou s’est emparée d’un pilon pour nous menacer. On a cherché à la raisonner et à la calmer, elle nous a rabroués. Et comme il n’y avait que des femmes, nous avons soutenu la dame pour la sortir de la maison et la conduire chez un voisin, en attendant le retour de son fils ». Grièvement blessée, Khady Diouf s’en tire avec une luxation de l’épaule et a perdu l’ouïe. « Depuis, Khady Diouf avait presque perdu sa mobilité et était devenue sourde », témoigne sa voisine

Khady Diouf à ses voisins : « Ma belle-fille va me tuer un jour… »

Pourtant, ce ne sera pas la seule fois que la vieille Khady Diouf subissait la colère de sa bru. Une autre fois, elle va assister impuissante à la destruction de ses médicaments, que sa belle-fille va plonger dans une calebasse remplie d’eau. Choquée ce jour-là, elle a pleuré longuement, avant de confier ses craintes à ses voisins : « Elle nous a dit qu’elle est convaincue qu’un jour, sa belle-fille allait la tuer ». Terrorisée par sa bru, clouée au lit par une maladie chronique, le diabète, elle en avait perdu l’appétit. « D’ailleurs, elle ne mangeait plus vraiment, elle avait peur tout le temps », au point qu’une de ses nièces, du nom d’Ami Collé, expulsée de la maison par la bru, s’est décidée à prendre en location un appartement situé non loin de la maison pour pouvoir cuisiner et donner manger à la vieille Khady Diouf.

Réaction de l’époux : « Je ne peux pas avoir une maison et accepter que ma mère n’y habite pas »

A la Cité Air France, beaucoup s’interrogent encore sur l’attitude d’Abdoulaye Bâ. Pourquoi n’a-t-il pas réagi à temps pour sauver sa mère ? Pourquoi n’a-t-il pas fait partir sa mère ou son épouse avant que le drame n’arrive ? Dans la rue, on pense connaître la raison : l’ex auxiliaire gendarme était épris de sa femme, mais également, il tenait beaucoup à sa maman. C’était un dilemme pour lui et certainement, il en souffrait beaucoup. La preuve, quand des voisins lui ont conseillé de faire partir sa mère et de la ramener dans leur village à Dougar, Abdoulaye a répondu sèchement par la négative : « Pas question de construire ma maison et d’y habiter sans ma mère», confie Khady Ndiaye Tall, voisine et amie de la vieille Khady Diouf. Pourtant, un jour, la vieille avait réussi à s’extraire des griffes de sa bru pour retourner à Dougar. Elle n’y est pas restée longtemps, son fils est allé la prendre pour la ramener à la cité Air France où peut-être « son destin » de belle-mère tuée par sa belle-fille avait commencé à se dessiner sous la forme d’un meurtre d’une cruauté qui a laissé sans voix les habitants de Kounoune

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