Depuis ton rappel à Dieu, le 15 mars 2017, des éloges n’ont pas tari pour te chanter, toi Serigne Cheikh. Un chapelet de qualificatifs, de substantifs et de superlatifs n’a pas suffi pour camper ta personne et ton personnage de Khalife, tellement tu as été un être multidimensionnel et exceptionnel. Aucune épithète ne saurait te correspondre, juste un mot peut-être : phénomène.
Je l’emprunte à El Hadji Lamine BÂ de Louga, préfet et fidèle compagnon de Serigne Abass SALL qui t’appelait affectueusement ainsi et pour moi un prétexte pour te rendre hommage en ce jour si symbolique du 25 mars. Cheikh Ahmed Tidiane SY, à l’instar de ses Imâms Seydina Mouhamad (PSL) et Seyid Cheikh Ahmed Tidjâny Chérif (RTA,) tu as eu en toi une quantité de qualités et des qualités en quantité.
Ta destinée avait déjà tracé ton destin depuis ta sublime naissance pendant laquelle le Saint homme de Fès avait exigé à ton père, Serigne Babacar SY, de te donner son prénom et d’assurer personnellement ton parcours initiatique. Ta vie durant, tu as été au service de ta mission comme porteur et défenseur du legs mouhamédien afin de rendre l’homme à Dieu et Dieu à l’homme. Cette mission, tu l’as accomplie sans compromission grâce à ta verve qui a été le socle de ton verbe pétri de science, d’érudition et de sagesse. Tu n’as jamais voulu voir l’humanité gémir sans frémir, encore moins une créature pâtir sans compatir.
Merci à Allah de t’avoir fait comme tu as été. Merci à toi d’avoir été celui que tu as été : accomplir ta tâche sans tâche. C’est pourquoi, au soir de ta vie, ta générosité, ta magnanimité et ton humanité ont fait l’unanimité.
Tu as été grand et fin aussi bien de taille que d’esprit. Dans la famille de Chamsdine, tu as été la fin au sens de but et de finalité. Les sillons menant aux boulevards des délices de Firdaws sont auréolés d’anges tout de blanc vêtus pour célébrer ta traversée comme César du haut du Colisée, tout triomphant. Au fond du hall, tu apercevras l’italien Aldo Moro, pour qui tu te veux l’avocat assis aux côtés de ton complice chinois Zhou Enlaï, de tes pairs Amîn Al Housseynî le palestinien, Gamal Abdel Nasser l’égyptien, Faysal Ben Abdoul Aziz le saoudien, Hassane II le marocain, Léopold Sédar Senghor et Lamine Gueye les compatriotes.
Ces derniers, tu les as côtoyés, fréquentés et conseillés. Dans les parages, tes paires de mystiques joyeux de recevoir leur joyau et je peux nommer ta tante Rabihatoul Adawiya, tes frères Sîbawayhi et Yahyal Barmakî ; tes pères Khalifa, Balkhawmi et Dabakh les successeurs de Maodo ; l’héritier de Niôl Fouta Thierno Seydou Nour ; ceux de Borom Touba Serigne Fallou et Baye Lahad tes complices ; Cheikh Sidaty et Mame Alassane Laye, les ascètes sans oublier tes deux fidèles cheikhs que sont l’Elu du Saloum Baraham Niasse et le Noble de Darou Khoudoss, Gaindé Fatma.
Pour eux, tu as été l’enfant chéri qui sera par la suite l’alter ego tellement tu as été le condensé de leurs vertus et qualités. Quelle belle fin que d’avoir comme Khalif, ton cadet Al Amine, toi Al Amine de ton père ! Quelle destinée d’avoir, toi le fils de Babacar et père de Mansour, un Babacar, fils de Mansour, porter ta sainte parole ! Et depuis, l’opinion se fédère dans sa nouvelle appellation, Abdoul Hakh, le serviteur de la vérité.
Cette vérité-même que tu as tant défendue de l’Atlantique au Pacifique, du haut des Mamelles et à la cime de la Tour Eiffel.
Ton allure princière rappelle la grâce des Guelewars parce que doublement de sang royal depuis Coumba Ndoffene, le Bour Sine à Bou Malick Sy, l’Almamy du Bundu. Ta finesse exalte ton élan chérifien hérité de Fatima Al Ansâriya, l’aïeule. Ton sang pur arabo-soudano-sahélien a fait de toi plus pur que Bankal, le champion pur-sang, et cela, sans avoir une démarche bancale. C’est pourquoi, tu as su et pu distinguer être à la mode et avoir du style.
Parce que tu as été viscéralement contre la bigoterie, le folklore et le farfelu, tu nous as toujours considérés, durant ton retrait et non ta retraite, comme des cadavres ambulants puisque nos âmes ne seraient habituées à l’abominable qui caractérise notre quotidien.
De par ta connaissance, tu as été une source intarissable des assoiffés de connaissance et le pôle caché des sciences gnostiques et ésotériques. De par ton ouverture à la modernité, tu as été la boussole des indépendants, des investisseurs et des éducateurs du nouveau Sénégal libre.
Dans l’hommage rendu à Serigne Babacar SY, tu as assimilé sa disparition à l’extirpation du sel qui donnait goût au monde. Avec ton voyage vers ton Seigneur, c’est la noblesse qui s’en est allée. Tes khalifs de Cheikh sont à jamais orphelins et esseulés : Cheikh Sidy Moukhtar de Mbacké Kadior, Ckeikh Ahmed Tidiane Seck de Thiénaba, Cheikh Ahmed Tidiane BÂ de Médina Gounas et Cheikh Ahmed Tidiane Niasse de Médina Baye.
Nulle encre ne saurait suffire pour te chanter. Nul clavier d’ordinateur ne pourrait tenir pour te camper. C’est pourquoi, je confie à la chouette de Minerve la teneur de mon cœur rempli certes de tristesse, mais oh combien de joie, pour qu’à la tombée de cette nuit de mercredi, elle s’envole autour de l’ombre de ton ombre et la dépose à Médine, qui rappelle la lumineuse, où gît désormais ton illustre corps abritant la future Zawiya qui portera à coup sûr ton nom, avec la clameur des wazifas qui se fera retentir jusqu’à Boujloud menant à la grande prairie de ton illustre homonyme.
Tu nous as aimés par ton exemple avec ta voix croustillante, chaude et suave. Homme de veille et d’éveil, tu as été pour nous une merveille. Tout délicieux comme cette chinoiserie, tu as été à croquer et nous te digérons doucettement au fond de notre cœur où tu logeras au-delà du temps, puisque tu te conjugues au présent éternel.
Au revoir copain.
A bientôt !
Mouhamadou Mounirou SY
Maître de Conférence en Droit (Université de Thiès, Sénégal)
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