Alors que les rumeurs sur la mort de Kim Jong-un ou sur un état végétatif se multiplient, c’est sa sœur qui aurait été désignée pour lui succéder le cas échéant.
Kim Jong-un, qui règne sur la Corée du Nord d’une main de fer, est-il mort ? Impossible à dire compte tenu du manque d’informations en provenance de la dictature. Mais les rumeurs vont bon train. La vice-présidente de HKSTV (Hong Kong Satellite Television) a annoncé sa mort sur le réseau social chinois Weibo avant de supprimer son post. Une annonce qui a été reprise par des médias chinois. Côté médias japonais, pas de mort annoncée mais un magazine, « le Shukan Gendai », annonce un état végétatif après la chirurgie de cœur subie par Kim Jong-un et qui aurait mal tourné, avec aucune chance de survie à terme.
Selon Reuters, au contraire, le train du leader nord-coréen a été repéré durant la semaine à Wonsan. C’est dans cette station balnéaire de l’est de la Corée du Nord que la famille Kim se rend en vacances. Mais sans pouvoir certifier que Kim Jong-un se trouvait à bord…
Ce qui est en revanche à peu près certain, c’est que son opération du cœur ne s’est pas déroulée comme prévu. Plusieurs médias américains, dont CNN, avaient qualifié de « grave » son état de santé et plusieurs sources ont confirmé que des médecins chinois s’étaient rendus à son chevet.
Impossible de démêler le vrai du faux, donc. Mais en cas de décès, qui lui succéderait ? A priori, la dynastie des Kim débutée avec Kim Il-sung, le grand-père de Kim Jong-un, se perpétuerait avec sa sœur cadette, Kim Yo-jong, qui serait en bonne place pour devenir la première « dictatrice » au monde. Car si elle venait à s’asseoir sur le trône nord-coréen, il ne faudrait pas s’attendre à un assouplissement de la part de celle parfois qualifiée de « plus sanguinaire que Kim Jong-un ». Portrait.
1. Veep
Selon plusieurs rapports et spécialistes, Kim Yo-jong aurait été promue à un poste important en décembre 2019, un poste d’équivalent de vice-président. Et le fait qu’elle succéderait à Kim Jong-un à sa mort aurait été à ce moment-là officialisé. « Kim Yo-jong a été officiellement nommé héritière en décembre 2019 par le Comité central du parti des travailleurs » a annoncé il y a quelques jours le quotidien japonais Yomiuri.
Les deux enfants de Kim Jong-un sont par ailleurs beaucoup trop jeunes pour régner et son frère, Kim Jong-chol ne serait pas intéressé.
2. « Baron noir »
Dans l’ombre, c’est elle qui orchestrerait les plans de communication de son frère depuis plusieurs années. En 2011, elle est nommée par Kim Jong-un au département de la communication étatique. La jeune femme, qui incarne une nouvelle génération de cadres du régime, s’attache alors à bâtir l’image de Kim Jong-un – dans l’ombre, puisque les médias d’Etat ne la citeront pour la première fois qu’en 2014, en marge d’un scrutin pour renouveler le Parlement. Fin 2014, signe d’une confiance absolue, Kim Jong-un la nomme vice-directrice de la propagande du régime. Dans le culte de la personnalité qu’elle forge autour de son aîné, elle s’attache à montrer un chef d’Etat bienveillant, accessible, à l’image de leur grand-père Kim Il-sung, fondateur du pays. Selon « The Guardian », elle encourage alors Kim Jong-un à visiter les foyers des humbles et à s’entourer de personnalités improbables telles que le basketteur américain Dennis Rodman.
3. Femme invisible
A l’inverse de son frère, elle ne souhaite pas prendre la lumière. L’une des premières images de Kim Yo-jong date du début de l’année 2012. Les Nord-Coréens la découvrent à la télévision d’Etat, en pleurs lors des funérailles de son père. Elle a alors autour de 23 ans, sa date de naissance exacte étant inconnue. Depuis, elle apparaît plus fréquemment lors des cérémonies. Elle avait par exemple accompagné son frère lors de la rencontre entre les deux Corées au moment des Jeux olympiques de 2018.
4. Working girl
La carrière de Kim Yo-jong est fulgurante. Le fait d’être le frère du « supreme leader » de la Corée du Nord facilite sans doute les choses. Il n’empêche : à chaque étape de sa carrière, elle a donné satisfaction à Kim Jong-un, que l’on sait pourtant versatile et qui aurait déjà fait assassiner des membres de sa famille. Après des études en Suisse, cette diplômée en informatique qui parle plusieurs langues a grimpé les échelons jusqu’à sa nomination, en octobre 2017, au Bureau politique du Parti des travailleurs de Corée, une instance de décision présidée par… son frère.
5. Affaire de famille
Les informations sur sa vie privée sont largement invérifiables. Selon le « Guardian », elle aurait épousé début 2015 le fils du vice-président du Parti des travailleurs, Chloe Ryong-hae, lui-même récemment promu à la puissante commission militaire du Parti, et serait mère d’une petite fille. Selon les sources, elle serait née entre 1987 et 1989. Elle est issue comme Kim Jong-un de l’union entre le précédent dictateur Kim Jong-il et sa troisième épouse, une danseuse nommée Ko Yong-hui qui a également fait l’objet d’un culte de la personnalité.
6. Rôle international
Outre sa présence lors de la rencontre historique entre les deux Corées au moment des Jeux olympiques, elle aurait joué – selon les spécialistes de la Corée du Nord – un rôle prépondérant dans le rapprochement entre Donald Trump et Kim Jong-un après l’escalade diplomatique au sujet de l’arme nucléaire. Et en mars dernier, elle avait félicité publiquement Donald Trump d’avoir envoyé à Kim Jong-un une lettre dans laquelle il espérait garder de bonnes relations bilatérales et proposait de l’aide pour faire face à la pandémie de coronavirus.
Elle ne manie pas que la carotte, elle sait aussi jouer du bâton. Il y a un mois, pour l’une des premières fois, elle avait pris publiquement la parole à propos d’un exercice militaire à tir réel, qui avait ému les Sud-coréens. Elle les avait alors traités de « chien effrayé qui aboie ». De « roquet » en quelque sorte, pour reprendre les mots de Laurent Fabius.
L’envergure qu’elle est en train de prendre sur la scène internationale n’est certainement pas innocente.
7. Suisse
Comme son frère, qui est passé par plusieurs établissements avec un nom d’emprunt, Kim Yo-jong a étudié en toute discrétion et sous haute protection dans une école privée de Berne, en Suisse, avant de revenir en Corée du Nord à la fin des années 2000. Elle parlerait couramment anglais et français.
L’Obs
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