Affaire Bougazelli : Entre l’histoire racontée et la réalité

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Une bonne partie du voile s’est levée sur l’affaire du trafic de faux billets de banque qui implique le député Seydina Fall «Bougazelli» et ses co-accusés. Les faits qui leur sont reprochés se sont précisés et ils ont été placés sous mandat de dépôt, hier.

C’est allé très vite. L’attente n’est pas longue, le face-à-face avec le juge non plus. Déféré au Parquet vers 10 heures, le député Seydina Fall Bougazelli a été présenté au Doyen des juges d’instruction, dans l’après-midi. Le magistrat instructeur a suivi le réquisitoire du Procureur de la République en notifiant au député son inculpation. Le monde s’effondre sur le parlementaire et responsable de l’Alliance pour la République (Apr) à Guédiawaye, arrêté le 14 novembre dernier, au quartier dakarois de Ngor, en détention de faux billets de banque. Placé en garde à vue depuis mercredi dernier, il a passé sa première nuit en prison, hier.

Bougazelli enfoncé par une batterie d’infractions

Le miracle n’aura pas lieu pour le député de la mouvance présidentielle, Seydi Fall Bougazelli et le cas de figure que ses proches et lui redoutaient le plus est advenu : le parlementaire n’a pas «survécu» à son face à face redouté avec le Doyen des juges. La sentence a été sans appel et le très élastique chapelet d’infractions égrenées par la magistrat instructeur en dit long sur le sale pétrin dans lequel s’est empêtré le député apériste. Bougazelli est inculpé et placé sous mandat de dépôt, pour «association de malfaiteurs, contrefaçon de billets de banque ayant cours légal, blanchiment de capitaux et tentative de corruption». Une tournure qui lui a grandement ouvert les portes de la prison centrale de Rebeuss. Les délits d’association de malfaiteurs et de contrefaçon de signes monétaires étaient alors retenus à son encontre. Deux infractions qui traduisent la genèse de la procédure dite de trafic de faux billets de banque. Le premier délit (association de malfaiteurs) renseigne sur le nombre de personnes impliquées dans l’affaire, au nombre de six, dont un ressortissant burkinabè et un rappeur répondant au nom d’artiste de Guesthia. En plus clair, il est reproché aux mis en cause d’avoir agi de concert et en intelligence pour donner corps à une entreprise délictuelle. Le second délit visé : la contrefaçon de faux billets de banque renvoie au corps du délit qui consiste à la manipulation de faux billets de banque. Une pièce à conviction qui sera saisie et placée sous scellé pour les besoins de la procédure en cours.
Controverse autour du montant des faux billets saisis.

Pièce à conviction essentielle pour asseoir la culpabilité des mis en cause, dans cette affaire de trafic présumé de faux billets de banque, qui a perdu le député Seydina Fall Bougazelli et cinq autres présumés faussaires, le montant exact, ou même estimé, n’est pas connu. Le pactole est difficile à évaluer en raison de la nature des billets. «La  saisie est en majorité constituée de billets noirs. Ceux qui sont lavés sont en coupures d’euros.  Le comptage n’a pas été fait», souffle une source. Mais, dans une déclaration faite dans L’Observateur le jour de son arrestation, le parlementaire avait estimé la somme à 32 millions de FCfa. A sa suite, la clameur publique va revoir à la hausse ce montant porté à 32 milliards de FCfa. Un verrou qui va certainement sauter avec l’ouverture d’une information judiciaire qui verra le magistrat instructeur approfondir l’enquête.

Personnes arrêtés, libérées et recherchées.

Huit. C’est le nombre de suspects qui ont été au départ, ciblés à l’enquête préliminaire, par les gendarmes de la Section de recherches, dans cette affaire de trafic de faux billets. À l’entame de l’enquête, deux des huit suspects auditionnés, seront remis en liberté. Il s’agit de la dame Irène Preira et son copain restaurateur, Kalidou Sy, arrêtés, selon nos confrères de «Enquête», le 21 novembre dernier, au quartier Amitié. Faute d’éléments à charge de nature à motiver leur inculpation, ils ont été relâchés, effritant la liste à désormais six mis en cause, dont le député Bougazelli. Le même jour (jeudi 21 novembre 2019), cinq éléments présumés de la bande, dont le rappeur Guesthia et un ressortissant burkinabé, sont déférés au parquet du tribunal de grande instance de Dakar. Seulement, la liste de six personnes inculpées dans cette affaire de trafic de faux billets de banque, semble loin d’être exhaustive. Selon des sources concordantes avisées, d’autres suspects impliqués dans ce dossier, sont déjà dans le viseur du magistrat-instructeur. «Plusieurs d’entre eux ont été identifiés et assurément de fil en aiguille, l’instruction permettra de remonter la filière et faire tomber d’autres têtes», soufflent nos interlocuteurs.

Tentative de corruption.

Le parlementaire n’était visiblement pas au bout de ses peines. Bougazelli qui cherche à se démêle d’un sable mouvant, va davantage s’enliser. Le Doyen des juges greffera deux délits supplémentaires à ceux visés : le blanchiment de capitaux et la corruption, qui allongent la liste des griefs retenus contre le parlementaire. D’après les informations de L’Observateur, le député a proposé de l’argent aux pandores après son arrestation. Même si un chiffre a été avancé, le dossier remis au Doyen des juges reste muet sur le montant que Seydina Fall a voulu «offrir» aux gendarmes contre leur silence. Des sources avisées souffleront que le député va dans un instinct de se tirer d’affaire, «tenter de corrompre les gendarmes, pour obtenir sa libération par l’étouffement de l’affaire». Une proposition qui ne va pas prospérer. Ces confidences de nos sources semblent assurément avérées, avec le délit de tentative de corruption greffé dans la kyrielle d’infractions retenues contre Bougazelli, au cours de son face à face hier vendredi, avec le Doyen des juges.

Un pool d’avocats invisibles.

L’information est tombée mercredi dernier, à la suite de la mesure de placement en garde à vue, prise contre le député Bougazelli, par les pandores de la Section de recherches. L’un de ses avocats, Me El H. Diouf, renseignait que son client avait commis pour sa défense 30 avocats. Ce chiffre qui semble excessif aux yeux de certains, est diversement commenté sur la toile. Seulement, tout au long de l’enquête préliminaire, Me Diouf sera le plus en vue du pool d’avocats pressentis, dont l’actuel bâtonnier de l’ordre des avocats, Me Papa Layti Ndiaye, Me Seydou Diagne… Me Diouf a d’ailleurs été la seule robe noire à avoir assisté le député, de l’enquête préliminaire à son audition hier vendredi, devant le Doyen des juges. Selon une source judiciaire membre du pool d’avocats qui s’est abstenue de donner un chiffre, «la présence de Me Diouf seul pour assister Bougazelli, a une explication toute simple. De façon collégiale, les avocats commis ont convenu de ne pas assiéger les locaux de la gendarmerie ou encore du cabinet du magistrat instructeur. Et que Me Diouf, à lui tout seul, pouvait poser les actes qu’il faut, tout au long de cette étape judiciaire. Le pool d’avocats entrera en action au fur à mesure que la procédure avancera.»

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