À cause de l’augmentation inquiétante des contaminations, un couvre-feu a été instauré dimanche 13 décembre, quelques heures seulement après avoir été annoncé.
Les rues se sont vidées progressivement et, à 18 heures précises, une chape de silence s’est abattue sur Nouakchott, dimanche 13 décembre. Vers midi, le Comité interministériel Covid-19 a instauré dans la capitale mauritanienne et sur tout le territoire un couvre-feu « dès ce soir jusqu’à 6 heures du matin », ainsi que « l’application stricte des procédures prévues pour le transport des personnes ».
La prière collective du vendredi a par ailleurs été suspendue dans les mosquées jusqu’à nouvel ordre, a indiqué le ministère des affaires islamiques.
Dans un communiqué, la présidence a expliqué que ce couvre-feu entrait en vigueur en raison d’un « accroissement inquiétant des cas de contamination au coronavirus et des décès qu’il a causés, et en renforcement des mesures barrières qui sont actuellement les meilleures armes dont nous disposions ». Des mesures sociales d’accompagnement destinées aux couches les plus pauvres doivent être envisagées.
La soudaineté de ces décisions a surpris tout le monde. Début décembre pourtant, une première série de restrictions, allant de la fermeture des écoles et des universités à la réduction de la fréquence du conseil des ministres, avait déjà été décrétée. « Mais instaurer un couvre-feu pour le soir même, on n’aurait jamais pu l’imaginer, estime Ciré Kane, sociologue. Cette précipitation prouve l’échec de notre politique sanitaire. »
279 contaminations en une journée
Dès l’annonce officielle, les Nouakchottois se sont organisés pour rentrer chez eux avant l’heure fatidique. A la hâte, les coups d’envoi des matchs de football ont été avancés pour finir à temps et, vers 17 heures, les files d’attente se sont allongées devant les milliers d’épiceries que compte la capitale. Au dernier moment, il fallait acheter quelques sandwichs pour le dîner, des paquets de gâteaux et évidemment du thé.
« Ce couvre-feu, c’est vraiment n’importe quoi, s’emportait Ahmed, un épicier de Tevragh Zeïna, le quartier de la capitale le plus touché par la pandémie. Les gens n’ont même pas eu le temps de s’organiser pour faire leurs courses. » La soudaineté de l’annonce alimente aussi les théories complotistes. « C’est encore une magouille de nos politiques pour capter plus rapidement l’argent de l’OMS [Organisation mondiale de la santé], s’insurge un homme emmitouflé dans son haouli, son chèche. Ils inventent n’importe quoi… »
Mais les chiffres officiels ne laissent aucune place au doute : depuis une quinzaine de jours, la Mauritanie, comme d’autres pays africains, est frappée de plein fouet par une deuxième vague de Covid-19. D’une trentaine de cas quotidiens fin novembre dans un pays qui compte quelque 4,4 millions d’habitants, le nombre de contaminations a bondi à une centaine début décembre pour atteindre le niveau historique de 279 cas pour 7 morts samedi 12 décembre, battant au passage le record de 227 cas établi le 24 juin. Au total, 10 780 personnes ont été touchées par le Covid-19 en Mauritanie et 222 en sont mortes.
« Relâchement de la population »
Le directeur de la santé publique Sidi Ould Zehave a déclaré samedi que les centres hospitaliers « s’approchaient de la saturation ». « La deuxième vague est bien là, explique au Monde Afrique le docteur Mohamed Mahmoud Ely Mahmoud, directeur de l’information stratégique et de la surveillance épidémiologique (Disse). Son apparition est très certainement liée au rafraîchissement des températures, mais aussi au relâchement de la population qui, après la première vague, s’est regroupée lors de cérémonies ou d’évènements sportifs. Les différents protocoles mis en place, comme le port du masque et la distanciation sociale, n’ont pas toujours été respectés. »
D’autres restrictions sont-elles à prévoir dans les prochains jours ? Nul ne peut le dire, « mais je pense que la fermeture de l’espace aérien et les interdictions de déplacements entre les villes, qui avaient fortement affaibli notre économie en juin, ne sont pas à envisager », indique le directeur de la Disse.
Dans la capitale en début de soirée, il n’y avait dans les rues désertes que des chiens errants et parfois quelques ombres furtives entre les maisons. Plus tard, seul l’appel à la prière du muezzin est venu interrompre le silence de la ville.
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