Le pape François a confié avoir « pleuré » lors de son déplacement en Birmanie et au Bangladesh en écoutant les récits d’exil de seize réfugiés de l’ethnie musulmane des Rohingyas.
Le pape François a confié samedi avoir « pleuré » en écoutant la veille à Dacca seize réfugiés musulmans rohingyas, et révélé que les rencontrer avait été « une condition » à son déplacement en Birmanie et au Bangladesh.
« Je savais que je rencontrerais les Rohingyas, mais je ne savais pas où et comment, c’était la condition du voyage pour moi », a-t-il spécifié aux journalistes dans l’avion qui le ramenait à Rome après six jours de voyage.
Il a rendu un hommage appuyé au gouvernement du Bangladesh qui a permis aux réfugiés de venir à sa rencontre à Dacca, depuis leur camp du sud du pays. « Ce que fait le Bangladesh pour eux est énorme, un exemple d’accueil », a loué le pape.
Les réfugiés, « effrayés », ont formé une file indienne pour venir lui parler vendredi à l’issue d’une rencontre interreligieuse. « Je pleurais, je cherchais à faire en sorte que cela ne se voit pas », a confié le pape. « Ils pleuraient aussi ».
« Je me suis dis, +je ne peux pas les laisser partir sans leur dire un mot+ », a raconté François qui a pris le micro pour leur demander « pardon » au nom de leurs persécuteurs.
François a précisé qu’une visite dans le plus grand camp de réfugiés au monde, où se trouvent 900.000 Rohingyas ayant fui la Birmanie, lui « aurait plu ». « Les choses ont été étudiées et ça n’a pas été possible, pour plusieurs facteurs, le temps, également la distance. Mais le camp de réfugiés est venu avec des représentants ».
Une grande prudence verbale en Birmanie
Il a aussi répondu à tous ceux qui se sont étonnés de sa grande prudence verbale en Birmanie, où il n’a jamais évoqué directement la minorité musulmane apatride et a évité de l’appeler par son nom, prohibé dans ce pays bouddhiste.
« Si j’avais prononcé ce mot dans un discours officiel, j’aurais +claqué la porte au nez+ » des Birmans, à l’instar de jeunes en pleine crise d’adolescence, a-t-il dit. « On savait déjà ce que je pensais », a-t-il noté, rappelant qu’il s’est publiquement exprimé à plusieurs reprises sur leur sort depuis la place Saint-Pierre.
« Pour moi, la chose la plus importante est que le message arrive », a-t-il insisté. « Disons que je n’ai pas eu le plaisir de claquer la porte au nez, en proférant une accusation publique, mais j’ai eu la satisfaction de dialoguer, de faire parler l’autre », a-t-il décrit à propos de sa tactique diplomatique.
Le pape, « très satisfait » de ses entretiens en Birmanie, a laissé entendre qu’il avait exprimé son opinion beaucoup plus clairement en privé.
A propos de sa rencontre lundi à Rangoun avec le chef de l’armée birmane, le général Min Aung Hlaing, François a évoqué « une belle conversation » au cours de laquelle il a fait passer des messages. Le puissant général avait avancé cette rencontre, donnant l’impression de griller la politesse à la dirigeante du gouvernement civil Aung San Suu Kyi qui l’a reçu le lendemain à Naypyidaw, la capitale administrative. « Il devait aller en Chine », a expliqué le pape, féru de « dialogue » et peu intéressé par le protocole.
L’ONU accuse les militaires birmans de mener une « épuration ethnique » contre les Rohingyas, qui sont 620.000 à avoir quitté leurs villages de l’Etat Rahkine ces trois derniers mois.
François, qui avait initialement pensé faire un voyage couplé avec l’Inde, n’a pas exclu de s’y rendre en 2018 (« si je suis encore en vie »). En revanche un voyage en Chine « n’est pas en préparation », même si cela lui « plairait tellement ». A propos des difficiles négociations de rapprochement en cours (les évêques nommés par le Vatican ne sont pas reconnus par Pékin), il a fait l’éloge de la lenteur, préconisant d’aller « pas à pas, avec délicatesse ».
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