Artiste, percussionniste, Mbaye Dièye Faye, a ouvert son cahier souvenir pour évoquer des passages intéressants de sa vie et de son immense carrière musicale. Dans cette interview accordée à Rewmi Quotidien chez lui, le petit-fils de « Sing-Sing » parle de ses projets. Par la même occasion, il dévoile les secrets de ses rapports avec Youssou Ndour, le patron de ‘’Super étoile’’. Quelques extraits de l’échange.
Qui est Mbaye Dièye Faye en dehors de la musique ?
C’est un petit-fils de Sing-Sing, issu d’une grande famille griotte. Je dirais que je suis une personne créée par Dieu. Il a fait de moi ce que je suis. Je suis le fils de Vieux Sing-Sing et d’Adjaratou Daro Mbaye. Je suis Lébou à 100%. Je suis le petit-fils de « Leuk Daour ». Il n’y a que les membres de ma famille et moi qui puissions dire être des petits-fils de ce dernier. « Leuk Daour » faisait des apparitions tous les jeudis à mon grand-père. J’ai appris à jouer le sabar. Mais avant tout, c’est dans le sang.
Quels sont vos rapports avec Youssou Ndour ? On vous surnomme même « jumeaux ». Pourquoi ?
Le mot jumeau, c’est par rapport au fait que lui et moi sommes nés le même jour. Youssou et moi, nous avons grandi ensembles ainsi que Mbagnick Diop. On est passé tous par toutes les étapes. On trainait ensemble de même que nos grands-parents. Nous sommes de la Medina entre la rue 15 et la rue 22. C’est en 1973 qu’on a commencé à entrer dans le milieu. Il chantait, et moi, je battais le tam-tam. A l’époque, on était dans un orchestre qui s’appelait Diamono1. C’est après qu’on a créé le Super Diamono. Il arrivait que je chante et batte le tam-tam en même temps parce qu’à la base, j’étais un chanteur. Mais quand j’ai vu que Youssou chantait super bien, je me suis dit que j’allais battre le tam-tam. On a fait du « khosslou », on a tout fait. Lors de notre premier 31 Décembre, on a eu tous les deux que 1000 francs. Il y avait un club libanais où on jouait souvent.
Vous avez quitté Number One pour le Super Etoile. Pourquoi ?
J’étais dans un groupe du nom de Diamono 1. Après la dissolution du groupe, je suis allé dans un autre groupe du nom de Super Xam. Il y avait Ousseynou Ndiaye, Jimmy Mbaye, Assane Ndiaye et moi. Un jour, on avait décidé de jouer à la caserne des pompiers Samba Diery Diallo. C’était un défi pour moi. Je voulais quelque chose de grandiose. Ce jour-là, il y avait le groupe Number One. Je m’étais fixé comme objectif d’impressionner tout le public et c’est ce que j’ai réussi à faire. Avec mon groupe, quand on a commencé à jouer et que ce fût à mon tour de développer, tout le monde s’est mis debout pour voir qui c’était. Quand j’ai fini, le frère de mon papa était très fier de moi y compris le guitariste. Et j’ai été invité dans un club tandis que jour-là, le percussionniste était absent pour des raisons de santé et on m’a demandé d’assurer sa place. J’ai joué et tout le monde avait apprécié.
‘’Number one’’ était un grand groupe. Un jour, il devait se rendre en Casamance et il m’avait convié d’y aller avec eux. J’ai répondu que je ne pouvais pas y aller sans l’accord de mes parents. J’y suis finalement allé, et ils m’ont proposé de travailler avec eux et m’ont proposé un salaire. Et un jour, Youssou a créé son groupe ‘’le Super Etoile’’ et la seule personne à laquelle il a pensé, c’était moi. Ainsi, il a fait appel à moi. On est allé voir des gens qui s’y connaissaient. Il a su que je pouvais apporter beaucoup au groupe.
« Youssou et moi, on a fait du « khosslou », on a tout fait… »
Avez-vous déjà eu un différend avec Youssou Ndour ?
C’est la question que tout le monde se pose. Beaucoup de gens prennent exemple sur nous, notre relation. Vous savez, les dents et la langue cohabitent ensemble, et il est normal que de temps en temps qu’il y ait quelques accrochages. Je me rappelle que c’est arrivé qu’une fois, et ce jour-là, on était tous les deux en furie. Et le plus drôle, c’est que tous les deux, quand on s’est retourné, on a tous versé de petites larmes. On a pleuré parce qu’on est de véritables amis et les circonstances avaient fait que ce jour-là, il y a eu une forte dispute mais c’était dans le cadre du travail. Ce que je raconte là, ça date bientôt de 20 ans. Mais à part ce jour, il n’y a eu plus aucune autre dispute entre nous. Dieu a fait que nous avons une vie commune, un lien. En plus, Youssou ne calomnie jamais.
Quelles sont vos rapports avec Fass ?
On ne peut pas parler de cette écurie sans y associer le nom de Mbaye Dièye Faye. Tu ne peux pas parler de cette écurie sans parler des Sing-sing. Comme j’ai l’habitude de dire : Nous sommes de bons lutteurs ! Non pas parce qu’on est des lutteurs (il fait allusion aux Sing-Sing) mais on est au courant de tout ce qu’ils font. Si je devais donner un exemple, je dirai que chez nous, (la famille Sing-sing) c’est comme un bureau où tout le monde travaille. Artistes et lutteurs se réunissaient tous à la maison. L’Ecurie de Fass est une grande écurie et mon oncle y jouait. Beaucoup de lutteurs sont passés à la maison.
Parlez-nous de votre cursus scolaire ?
Je n’ai pas duré à l’école. Disons que je suis allé jusqu’en classe de troisième. Je me suis plus concentré sur la musique et tout ce qu’il y avait autour comme les voyages par exemple. Je suis sûr que si j’y étais resté longtemps, je serai parmi les meilleurs aujourd’hui. Je vais vous raconter une anecdote : ‘’J’avais une maîtresse du nom de madame Ndao qui m’aimait beaucoup et à chaque fois qu’elle rentrait chez elle, elle m’appelait et c’est moi qui lui tenais les livres et cahiers. Il y avait aussi le Directeur qui m’aimait bien. Et à chaque fois qu’il y avait une fête à l’école, il me demandait de ramener un tam-tam et tous les élèves se cotisaient, me remettaient l’argent et je rentrais avec’’.
Vous avez encore l’air jeune ! Quel est votre secret ?
La question que tout l’univers me pose (rire).Premièrement, c’est Dieu qui m’a fait ainsi. Deuxièmement, j’ai une bonne hygiène de vie. Et troisièmement, je dors beaucoup, 12 à 14 heures par jours. Et enfin je ne stresse pas. Nombreux sont ceux qui pensent que je vais à la salle de sport tous les jours. Et je vais vous avouer une chose : cela fait presque 25 ans que je ne me suis pas entrainé .Hormis battre du tam –tam, je ne fais rien et ça, c’est plus que faire du sport.
En tant qu’artiste comment vous vivez la covid-19 ?
Comme tout le monde l’a vécu en respectant les consignes. Même si toutefois, Il y en a qui disent que la maladie n’existe pas. C’est insensé. Et puis tout est à l’arrêt. Il faut qu’on respecte les consignes.
En cette période de coronavirus, comment appréciez-vous la musique sénégalaise ?
Avec ou sans la Covid-19, nous les artistes, nous sensibilisons toujours la population. On l’a fait avec le concept « Fii Taye. » les autres artistes, l’ont fait à leurs manières. Et pour dire vrai, à travers les chansons de sensibilisation, le message est vraiment passé. Je les félicite tous !
«Quand on s’est disputé, on a tous versé de petites larmes »
Quels sont vos projets ?
J’en ai plusieurs. Oui ! Je prévois de faire des spectacles. J’ai des sons à venir. Mais avec le contexte dans lequel on est, rien ne peut se faire. Pour l’heure, on ne parle que de la Covid-19. Si Dieu nous donne la chance d’y assister, vous les verrez.
Par Anna Thiaw (stagiaire)
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