(Vidéo) Trafic humain, des sénégalais retenus à la frontière Iran-Turquie : « Kène Ki Déé na »

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Qu’est-ce que le trafic d’êtres humains (« human smuggling ») ?

Le droit international définit le trafic de personnes comme étant la fourniture « à une personne d’une entrée illégale » dans un pays « afin d’obtenir, directement ou indirectement, un bénéfice financier ou un autre avantage matériel. »[3] En d’autres termes, les passeurs clandestins aident des personnes à franchir des frontières clandestinement en échange d’un paiement. Le principal instrument juridique régissant le trafic de personnes est le Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer (Protocol against the Smuggling of Migrants by Land, Sea and Air) adopté en 2000.

Et qu’est-ce que la traite de personnes (« human trafficking ») ?

Le droit international définit la traite de personnes comme étant « le recrutement, le transport, le transfert, l’accueil ou la prise en charge de personnes », par le biais de menaces ou de l’utilisation de la force ou d’autres formes de contrainte comme l’enlèvement, la fraude, la tromperie ou l’abus de pouvoir « dans un but d’exploitation », le mot exploitation se référant, « au minimum » à « l’exploitation de la prostitution d’autrui ou d’autres formes d’exploitation sexuelle, du travail ou de services forcés, de l’esclavage ou de pratiques similaires à l’esclavage, de la mise en servitude ou du prélèvement non autorisé d’organes. »[4] En d’autres termes, les individus qui se livrent à la traite déplacent des personnes d’un lieu à un autre sans leur accord éclairé et les exploitent le long du chemin ou à leur destination finale. Le principal instrument juridique régissant la traite de personnes est le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, également adopté en 2000.

Quelles sont les différences essentielles entre le trafic et la traite d’êtres humains ?

Il y a trois différences fondamentales: le consentement, l’exploitation et la transnationalité.

Le consentement. La personne qui fait l’objet d’un passage clandestin accepte d’être déplacée d’un lieu à un autre. Les victimes de la traite, en revanche, n’ont pas accepté d’être déplacées ou, si elles l’ont accepté, ont été incitées à le faire par de fausses promesses, puis se sont retrouvées dans une situation d’exploitation.
L’exploitation. Le trafic de personnes prend fin à l’arrivée de la personne à la destination choisie, où le passeur clandestin et son passager se séparent. Au contraire, les individus qui se livrent à la traite exploitent leur victime une fois celle-ci arrivée à sa destination finale et/ou pendant le trajet.
La transnationalité. Le trafic de personnes implique toujours le franchissement de frontières internationales, alors que la traite se produit indifféremment selon que les victimes ont été emmenées dans un autre pays ou déplacées à l’intérieur des frontières d’un pays.
Mais les passeurs clandestins et les individus qui font de la traite ne profitent-ils pas tous du transport illégal de personnes?

En effet, que ce soit dans la traite ou dans le trafic de personnes, les réseaux criminels tirent profit d’une activité comprenant le transport d’êtres humains. Toutefois, dans le cas des passeurs clandestins, leurs clients acceptent de payer une somme d’argent et connaissent les risques qu’ils encourent, alors que dans les cas de traite, les individus qui la pratiquent gagnent de l’argent en exploitant des personnes qui n’ont pas donné leur consentement.

Les migrants peuvent-ils être l’objet à la fois de trafic et de traite lors du même voyage ?

Oui, certaines personnes victimes de traite peuvent commencer leur voyage en acceptant d’être transportées clandestinement dans un pays, mais se retrouver alors trompées, soumises à des contraintes ou placées de force dans une situation d’exploitation (par exemple, être forcées à travailler pour des salaires très bas ou être placées dans une situation d’endettement inextricable pour rembourser le coût de leur transport). Human Rights Watch a documenté des cas dans lesquels des migrants avaient versé de l’argent à des passeurs clandestins pour les transporter, puis avaient été remis entre les mains d’individus se livrant à la traite, qui les avaient retenus prisonniers et torturés pour obtenir des rançons en échange de leur remise en liberté et de l’autorisation de poursuivre leur voyage.[5]

Ainsi, lorsque des passeurs clandestins commettent des abus à l’encontre de personnes qu’ils transportent, ne s’agit-il pas de traite ?

Il peut arriver que les abus que certains passeurs clandestins font subir à leurs clients soient commis afin de les exploiter d’une manière qui corresponde à la définition de l’exploitation en droit international et dans ce cas, le passeur clandestin devient en effet un pratiquant de la traite. Mais dans la plupart des cas, de tels abus, y compris les violences infligées arbitrairement sans raison particulière, n’équivalent pas à de l’« exploitation. » Si ces exactions ne sont pas commises dans un but d’exploitation et les victimes poursuivent de plein gré leur voyage en compagnie des passeurs, elles ne devraient pas être considérées comme des victimes de la traite. En particulier, bien que les passeurs clandestins puissent exposer leurs clients à des risques importants et mettre leurs vies en danger en utilisant des embarcations hors d’état de naviguer ou surchargées, si les demandeurs d’asile et les migrants sont prêts à prendre de tels risques, un tel abus ne constitue pas de l’exploitation.

Si les migrants acceptent d’être transportés clandestinement, pourquoi devraient-ils recevoir de l’aide ?

La plupart des personnes qui utilisent les services de passeurs clandestins en dépit de tous les risques qu’elles encourent sont en droit de recevoir une protection, non pas en raison de leur moyen de transport ou des dangers de leur voyage, mais à cause des facteurs qui les ont poussées à fuir et de leur statut de demandeur d’asile ou de réfugiés. Des dizaines de milliers de demandeurs d’asile, qui fuient les persécutions et d’autres maux dans leurs pays d’origine, ont recours à des passeurs clandestins pour rejoindre des pays d’accueil par voie maritime. Décrire les criminels qui les acheminent comme des individus se livrant à la traite implique qu’ils arrivent contre leur volonté et cela évite d’avoir une discussion franche sur les raisons qui poussent tant de personnes à fuir leur pays.

Qui a intérêt à ce que les passeurs clandestins soient qualifiés de « pratiquants de la traite » ?

Qualifier incorrectement les « passeurs clandestins » de « pratiquants de la traite » permet d’ignorer commodément les raisons pour lesquelles les demandeurs d’asile et les migrants décident de quitter leur pays — comme les conflits, les violations généralisées des droits humains, les famines et la misère économique. Cela permet aux gouvernements des pays qu’ils tentent de rejoindre de prétendre que faire appliquer la loi importe davantage qu’assurer que les demandeurs d’asile puissent obtenir une protection et exercer leur droit de rechercher asile, et que des actes tels que la destruction de bateaux sont des gestes humanitaires visant à sauver des vies alors qu’en réalité, l’objectif de telles politiques est d’empêcher les personnes de migrer illégalement à travers les frontières de ces pays.

Et qu’en est-il des victimes des véritables traites ?

Le droit international encourage les pays à porter assistance et à protéger les victimes de la traite de personnes, notamment le Protocole sur la traite des personnes. Ceci contraint les pays à subvenir aux besoins des victimes sur les plans physique, psychologique et social et à envisager de les autoriser à rester sur leur territoire. Établir de claires distinctions entre la trafic et la traite de personnes permet d’éviter de remettre en cause ces obligations.

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