56 ans après ta naissance, je décide de t’écrire, te dire que je suis fier de toi, où tu sais que je me trouve.
Cher fils,
J’imagine que tu seras étonné de recevoir cette lettre de ma part, après toutes ces années! À vrai dire, j’ai décidé de briser le silence. Est-ce une surprise pour toi Macky, que je t’écrive ?
Les jours passent si vite. Mes souvenirs me ramènent encore à ce matin du 11 décembre 1961, le jour qui t’a vu naitre. Macky, père heureux que je sois depuis ta naissance te dresse toutes mes prières pour l’avenir. Quel père de famille ne serait pas fier de son enfant surtout quand celui-ci a mené sa vie avec dignité, modestie et crainte de Dieu ?
Les qualités, mon fils, tu en avais depuis ton Fatick natal. Comme ce proverbe peulh, « on voit dès l’enfance ce que sera l’homme », oui, Fatick et Foundiougne ont vu dès ton enfance l’homme que tu seras, mais le président de la République que tu seras, jamais je n’y avais rêvé. Tes premiers pas à l’école de Ndouk sont des souvenirs frais dans ma mémoire. Tu avais cette envie de rejoindre très tôt les classes. Les week-ends étaient trop longs pour toi, vu que le vendredi soir déjà, tu finissais tes devoirs de maison. Même à Kaolack, je recevais pleins de témoignages de ce jeune lycéen de Gaston Berger, assidu, rigoureux et stricte que tu étais. Ta maman où elle se trouve présentement tressaille de joie avec les anges du ciel.
Mon fils, tu as su traverser avec honneur un chemin parsemé d’embuches, de cabales malsaines et de calomnies. Alhamdoulilah ! Tu en es sorti la tête haute. Allah ne m’avait pas donné l’occasion d’être à tes côtés durant tes périodes de rudes épreuves. Tu les as vaincues peut-être grâce à ce que je te disais dans ton enfance : « Qui veut du miel doit avoir le courage d’affronter les abeilles». Tu as gardé ton sang-froid et ton courage que tu avais depuis tes premiers faux pas avec ta maman. Tu étais si pressé de marcher, mon fils.
Aujourd’hui tu es un exemple pour des milliers de Sénégalais et au-delà des milliers d’Africains. Macky, tu es un pur produit de l’éducation sénégalaise. Je fais un clin d’œil à mon président Léopold Sédar Senghor pour ses efforts pour une école sénégalaise de qualité. Convaincs la jeunesse à croire en elle. Tu as cru en toi et à la force du travail. Elle doit être fière du système éducatif que tu leur propose. A ton tour, investis dans l’éducation, écoute les attentes des enseignants. Ecoute leurs doléances, ils sont le baromètre de la morale et l’éthique du pays. Aux médecins et travailleurs de tous les secteurs confondus, prône le dialogue avec eux, ne sois pas intransigeant mais aussi ne sois pas trop flexible. Sache que quand il faut retrousser tes manches et vraiment faire un effort avec tous les travailleurs de tous les horizons, il faut le faire sans aucune considération partisane. Souviens-toi : « l’homme affamé ne connaît ni loi ni respect. »
Fils, imagine la joie de ta mère et moi quand toute une génération envisage suivre tes pas. Les pas que tu as tracés presque seul sans véritablement moi ou ta maman à tes côtés. Nos prières ont été ton chemin. Tu n’as jamais nié tes origines, sinon mes origines aussi modestes qu’elles soient. Tu fais ma fierté…
En ce jour où ta femme et peut-être mes petits fils couperont un grand gâteau avec toi, je joins mes prières à celle de ta mère pour t’encourager dans tes entreprises. Tu es aujourd’hui au sommet du pays. Ceci n’est pas ton seul fruit. Je pense à ma belle-fille, Marème qui, depuis votre union a su garder ses qualités d’une bonne sénégalaise. Je ne rentrerai pas dans les détails, tu la connais mieux que moi. La plus grande partie de l’éducation des enfants est inculquée par leur mère. Puisque tu es rarement présent. Tu as pris en compte ce que ma belle-fille a dans la tête, avant de te décider à avoir une progéniture avec elle. Ta mère Coumba sourit aux côtés des anges et vous bénit. Tu as choisi Marème pour ses ambitions. Ton épouse a été capable de te pousser vers le summum des postes électifs. Elle a, seulement, été une incubatrice d’idées, mais un soutien dans tes projets. Puisqu’elle sait te dire quand une intention est bonne ou pas. Les durs moments, elle les a passés avec toi.
Quant à l’éducation que tu as su inculquer à mes petits-enfants Amadou, Adji et Ibrahima, je suis plus que fier de toi. Ce que j’attendais de toi en tant que parent est de cultiver en eux la motivation. Tes enfants seraient plus motivés de réaliser des choses toujours plus difficiles s’ils ne reçoivent pas trop de louanges sur leur intelligence et leur talent. Tu as semé cette bonne graine éducative en mes petits-fils. Je remercie Dieu qu’ils soient aussi attentifs à tes instructions. Quelle grâce ! Moi qui n’avais jamais songé une telle ascension de toi. N’oublie pas tous ceux qui t’ont aidé dans cette escalade.
Je ne saurais te donner de conseils extraordinaires pour ta vie qui est devenue politique depuis des décennies. Je te dirai d’avoir de bons conseillers autour de toi. Ecoutes-les, analyses ce qu’ils te diront et à chaque fois rabats-toi sur Dieu, seul lui détient les bonnes solutions. Le seul conseiller par excellence est Dieu. Consulte ta femme comme je le faisais avec ta maman.
Je n’ai pas occupé de hautes responsabilités en politique mais avec ma petite expérience avec le parti socialiste, je ne sais pas si tu te souviens encore de ces samedis où tu m’accompagnais à mes réunions politiques, tu étais si attentifs aux différentes prises de paroles. Mais je te dirai d’écouter aussi tes opposants politiques, en eux, brillent des vérités indéniables. Ne te mets pas en mal avec ceux qui t’ont fait confiance : le peuple sénégalais. Fais savoir à ceux qui t’ont combattu et humilié hier que tu es né après le pardon. Accorde la clémence à ceux qui t’en ont demandé. Pardonne ceux qui t’ont offensé. Dans tes moments de vache maigre, garde toujours en toi la force et la soif de vérité qui font briller tes yeux depuis le jour de ta naissance.
La joie que j’ai ressentie le 25 mars 2012 m’a fait oublier la peine que j’avais endurée du 04 octobre 2007, quand tu portais encore le deuil de ta maman, jusqu’ au 9 novembre 2008, jour d’une de tes grandes décisions. Un véritable contraste. « Qui se sent seul doit rejoindre le troupeau ». Comme ce proverbe mandingue, tu as rejoint le peuple. Ce peuple qui place désormais son espoir, son devenir, sa destinée en toi.
Mon fils, aux « retourneurs » de veste, méfie-toi d’eux. Ils sont et seront toujours avec toi. Sache mettre la différence entre eux. J’aurais tout donné pour guider tes pas mais le destin en avait décidé autrement depuis presque deux décennies. Macky, il arrive que des dossiers de la justice polarisent toutes les attentions, mais de grâce, n’influence pas, ne charge pas, ne décharge pas… Toi-même tu as été victime d’une injustice notoire, donc pour rien au monde n’abuse pas de ton pouvoir. Evite la justice à double vitesse car tu es le président de tous les Sénégalais.
Mon fils, tu as pris les rênes du pouvoir avec tous les honneurs. Tache de les rendre dignement. Ne pense pas au troisième mandat. Le moment venu, certains te conseilleront de faire un forcing. Ne les écoute pas, ils sont mus par leurs propres intérêts.
Je sais que tu es parfois mal à l’aise du fait que nous, tes parents ne sommes plus à tes côtés alors que l’arbre que nous avions planté a maintenant produit. Les fruits ont muri. Oui, ils sont murs pour tout un peuple. Ne pense pas à nos départs prématurés mais plutôt à nos prières. Que Dieu te protège !
Ton papa qui t’aime. Amadou Abdoul Sall
Joyeux anniversaire au Président Macky Sall
Hommage à Amadou Abdoul Sall, père de Macky Sall, rappelé à Dieu en 1998
D’après une idée originale de Ankou Sodjago, journaliste reporter, 3e prix meilleur reportage sur les droits de l’homme, Prix d’excellence des médias de l’Afrique de l’Ouest 2017 (WAMECA). ([email protected]).
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