À Dakar, l’agression et le vol à mains armées sont devenus des métiers pour beaucoup de jeunes, qui livrée à eux-mêmes, sans emploi, ni source de revenus, s’adonnent à ces pratiques dangereuses et illégales.
Même si ce n’est pas un phénomène nouveau, les agressions de civils sont devenues plus récurrentes après la levée des restrictions imposées par le Gouvernement à cause de la pandémie de Covid-19.
En effet, le Sénégal, plus particulièrement sa capitale Dakar, a enregistré le plus faible taux d’agression pendant la période du couvre-feu, entre le mois d’avril 2020 et le mois de mars 2021 (il y a eu une période intermédiaire de quelques mois levée des restrictions avant la deuxième vague de Covid-19). Dans cette période ou des couvre-feu ont été instaurés, les petits bandits et autres agresseurs n’avaient plus accès à leurs cibles contraintes de rester chez elles par la pandémie.
Mais depuis la fin de l’Etat de catastrophe sanitaire précipitée par les événements sanglants de début mars 2021, les jeunes malfrats ont repris du service à Dakar. Il ne se passe plus un jours sans qu’une agression ne soit signalée. Surtout dans certains quartiers de la banlieue où PressAfrik a tendu le micro à certaines victimes. À Keur Massar, Mbao, Thiaroye, Pikine, il faut éviter de traîner seul dans certains coins à certaines heures. Le manque chronique d’emploi a installé une délinquance sans nom et créé de jeunes criminels. Des malfrats, souvent multirécidivistes qui sillonnent les quartiers et les routes, jour et nuit, volant, blessant et parfois tuant tous ceux qui ont le malheur de croiser leur chemin.
« Woy sama ndeye fane la dieum?» (Oh mon Dieu qu’est-ce que je vais devenir ?)
Sac à main blanc accroché à son bras, Aita, une jeune femme d’environ 25 ans marche sur la passerelle un peu déserte de Keur Massar pour se rendre à son école. Quand subitement, sorti de nulle part un jeune homme lui arrache son sac et s’enfuit avec. Désemparée, elle se met à crier et à pleurer attirant l’attention des passants qui se regroupent autour d’elle. Les yeux bouffis de larmes, la jeune femme s’est assise à même le sol en répétant le même mantra « woy sama ndeye fane la dieum?»(oh mon Dieu qu’est-ce que je vais devenir ?).
Une fois ses esprits retrouvés, Aita explique que son sac à main volé contenait son argent de sa scolarité (elle étudie dans une école de la place) ainsi que ses papiers et un IPhone 8+ qu’on vient de lui offrir. « Le voleur a pris mon sac et il y a mes papiers dedans ma carte d’identité mon passeport et d’autres papiers administratifs que j’y gardais pour l’école. Une somme de 125 mille et poussières et mon IPhone. Une somme qui était destinée pour payer mes deux derniers mensualités scolaires. Tout, parti comme ça même mon nouveau téléphone » se lamente-t-elle les mains sur le visage.
Un peu, loin, les deux jeunes hommes qui ont tenté d’appréhender le voleur reviennent bredouilles. « On l’a poursuivi jusqu’en bas de la passerelle, mais quelqu’un d’autre l’attendait sur une moto, ils sont partis ensemble ». Une déclaration qui a suscité l’indignation dans la foule de passants qui s’était regroupée pour essayer de consoler la victime.
« L’un d’entre mes agresseurs étaient prêt à me violer si… »
Effectivement, selon certains procureurs, la violence est liée à la précarité du milieu de vie. Il s’agit souvent d’environnement pauvre tel que la banlieue dakaroise. « Les agresseurs sont souvent des gens avec un niveau d’instruction faible recherchant un quelconque réconfort » disent-ils. Les agressions sont le plus souvent observées dans les environnements avec un niveau socio-économique faible. D’après les témoignages, les agresseurs peuvent être aussi bien des hommes que des femmes. Un des notables de ces quartiers déclare que « les agresseurs sont souvent des personnes majeures, vivant dans une certaine précarité, parfois des jeunes désoeuvrés ».
Fatma, elle aussi jeune étudiante dans une université de la place, déclare avoir été victime de vol avec agression. En effet, habitant dans la banlieue dakaroise, elle rentre parfois tard le soir. Il n’y a pas longtemps nous raconte t’elle « j’étais descendue de mes cours vers 19 heures, mais je peinais à avoir un bus. C’est seulement vers 20 heures que j’ai réussi à en avoir un. Du coup, je suis arrivée vers 21 heures passées dans mon quartier où trois hommes m’ont menacé avec un couteau pour avoir mon sac à main. Je n’ai pas résisté, je le leur ai donné, mais l’un d’entre eux m’aurait violé s’il n’avait pas entendu des gens venir ».
Par conséquent, ajoute-t-elle depuis lors « je loge chez une cousine qui habite plus près, car j’ai peur que la prochaine fois, on me viole ou qu’on me tue ».
« Mon couteau, c’est juste pour intimider les gens que j’agresse. Je n’ai que le gang pour nourrir ma mère et ma sœur »
Interrogé, Bassirou le plus jeune d’entre eux, âgé de tout juste 17 ans. Habillé en capuche, jean déchiré et sandales, comme la plupart de ses copains du « Gang », il accepte s’exprime sans regarder dans les yeux son interlocuteur. « Je suis avec le gang parce qu’au moins, j’ai quelque chose (un peu d’argent) pour satisfaire mes besoins. Je n’ai que ma mère et ma sœur est encore jeune, j’ai arrêté l’école très tôt et je ne sais rien faire d’autre à part raquétté les gens. Mais je ne blesse personne, j’ai un couteau juste pour intimider les gens », dit-il avant de couper court à la discussion. Il sera d’ailleurs le seul à s’exprimer devant nous. Pour les autres, c’est hors de question.
Malgré les nombreuses arrestations opérées par la police et la gendarmerie, le phénomène des agressions continue de se développer et d’être une menace à la libre circulation des personnes dans la capitale sénégalaise et sa banlieue.
Pour autant que l’on sache, le vol et l’agression sont punis sévèrement par la loi. Car, toute personne coupable de vol ou de tentative de vol commis avec l’une des circonstances prévues à l’article 366 du présent Code « est puni d’un emprisonnement de cinq ans à dix ans et d’une amende de 50.000 à 500.000 francs ».
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