Révélations détonantes de « Dr Samba » face aux enquêteurs, Les agents qu’il avait testé au Coronavirus déclarés négatifs par l’Institut Pasteur

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La machine s’emballe pour le faux médecin Amadou Samba. Cuisiné par les limiers de la Sûreté Urbaine de Dakar, l’homme qui se faisait passer tantôt pour un cardiologue, tantôt pour un gynécologue, est finalement passé à table. Révélations déconcertantes sur le face-à-face entre «Dr Samba» et les enquêteurs.

Le «docteur» Amadou Samba n’a toujours pas reçu son «ordonnance» de déferrement devant le procureur de la République. Retenu depuis vendredi dernier dans les locaux du Commissariat central de Dakar pour une kyrielle d’infractions dont la principale porte sur la mise en danger de la vie d’autrui, il devra encore patienter dans l’antichambre de la Justice. Même si son diagnostic ne fait plus l’objet d’un grand doute : ça sent le roussi pour ce pseudo-médecin qui a eu le toupet d’effectuer des tests du Covid-19 sur des employés dans une dizaine de structures de la place évoluant dans divers secteurs d’activités. A la suite de la mesure de garde à vue prise à son encontre, vendredi dernier, par les limiers de la Sûreté urbaine de Dakar en charge de l’enquête, Amadou Samba avait été «confiné» dans un local et surveillé comme du lait sur du feu par des agents de police. «Une restriction de ses visites a été ordonnée vu le contexte actuel marqué par la propagation du Covid-19. Il n’a, par contre, reçu la visite d’aucun homme politique de quelque bord et n’a été extrait que par moments pour des besoins naturels», confient des sources de «L’Observateur».

Son déferrement devant le Procureur près le tribunal de grande instance de Dakar qui était prévu, hier lundi, a finalement été reporté à la faveur d’une prolongation de garde à vue ordonnée par le maître des poursuites. «La raison est des plus évidentes, expliquent les sources de ‘’L’Observateur’’. La prolongation s’expliquent par la complexité de cette affaire, de l’ampleur du préjudice, mais aussi du nombre important de personnes et structures qu’il a embarquées dans sa saga.»

Cdc, Petrosen, Soboa, l’hôpital de Grand-Yoff, les cliniques Raby et Jaboot… victimes du faux médecin

Une situation d’une hyper-complexité pour les enquêteurs qui ont passé toute la journée d’hier lundi à auditionner à tour de rôle des responsables de plusieurs structures de la place qui avaient sollicité les services du fameux «Dr Samba», ou qui l’avaient employé dans leur boîte. Des pharmaciens et travailleurs de la santé ont également été entendus. Des auditions marathons qui seront poursuivis jusque tard dans la soirée du lundi. Parmi les victimes, de grandes entreprises comme la Société des pétroles du Sénégal (Petrosen), la Caisse des dépôts et consignations du Sénégal (Cdc), le Centre de transfusion sanguine, la Société des brasseries de l’ouest-africain (Soboa), l’Hôpital général Idrissa Pouye ex-Hoggy, les cliniques Raby, Jaboot etc. Au nombre des plaignants également entendus sur procès-verbal, figurent le président de l’Ordre des médecins du Sénégal, Dr Boly Diop, le ministère de la santé, l’Institut Pasteur, des gérants de pharmacies de la place, mais aussi plusieurs médecins. Ces derniers sont tombés dans le piège du faux docteur à cause d’un projet de dons. Pour certains, Amadou Samba a poussé l’escroquerie jusqu’à l’utilisation de leurs cachets et autres entêtes. L’école de management «Ism» où Amadou Samba dit avoir obtenu son «Mba», s’est démarquée. A travers un communiqué rendu public hier lundi, l’institut de formation note, «il est rigoureusement établi qu’il (Amadou Samba) n’a jamais été diplômé de l’ISM. (…) Il a été certes admis au programme exécutive Mba en toute conformité avec nos exigences académiques. Il n’a suivi que 2 cours avant de disparaître.»
Les auditions menées tambour battant par les enquêteurs ont permis de relever le caractère léger de plusieurs structures sanitaires, publiques et privées, victimes des manœuvres de Amadou Samba qui changeait de spécialité comme il changeait au gré de ses coopérations.

«Dr Samba» était à la fois cancérologue, cardiologue, gynécologue…

Tantôt il se faisait passer pour un cancérologue, tantôt il postulait pour être cardiologue, gynécologue, médecin généraliste, voire spécialiste du diabète. Comble de légèreté, le prévenu est parvenu à se faire embaucher sur simple présentation de sa carte de médecin qui s’est révélée être une fausse, non authentifiée par l’Ordre des médecins du Sénégal. Même si elle a été «établie par le ministère de la Santé». Pis, l’enquête va aussi révéler que Amadou Samba avait un «deal» avec certaines cliniques de la place où il jouait en quelque sorte le rôle de rabatteur en orientant plusieurs patients vers la clinique. Un partenariat gagnant-gagnant. Les deux parties, lui et ces structures de santé, y trouvaient leurs comptes», soufflent les sources de «L’Observateur» qui n’ont pas manqué de déplorer «la naïveté doublée de légèreté extrême des responsables des structures sanitaires qui collaboraient avec lui et, par-dessus tout, le silence complice de ces derniers». En plus de fustiger l’attitude de ces blouses blanches, nos interlocuteurs ont déploré le fait que «ces derniers cherchent, avec l’ébruitement de ce scandale, à se prévaloir de leur propre turpitude». Ils en veulent pour preuve le fait que Amadou Samba était omniprésent aussi bien dans plusieurs structures sanitaires et pharmaceutiques de la place, qu’il prenait part à plusieurs rencontres officielles des médecins, allant même jusqu’à clamer publiquement son statut de toubib sur des plateaux de télévision sans que l’Ordre des médecins ne bouge le petit doigt».

«Des prélèvements sanguins effectués après des recherches sur Google»

Un «silence complice» qui a visiblement boosté les ambitions du pseudo-médecin qui va voir les choses en grand en s’engouffrant dans la brèche ouverte par la propagation du Covid-19. Le «docteur» Samba signe des contrats avec une dizaine de structures pour, notamment, des prestations de tests du Coronavirus sur des agents récemment rentrés de pays à risque. Il va ainsi délivrer des attestations de résultats négatifs, sans aucune compétence. Interpellé sur la pertinence d’une telle pratique, sa réponse étale les carences, la moralité et le manque de scrupule d’un adepte du gain facile. Le mis en cause dira aux enquêteurs avoir décidé d’effectuer des tests du Covid-19 via des prélèvements sanguins après avoir effectué des recherches sur le moteur de recherche en ligne «Google». Sur son cursus scolaire, le «docteur» Amadou Samba se montrera évasif. «Tantôt, il prétend avoir arrêté en 4e année de Médecine, tantôt à la 7e année où encore à la 8e année.» Des changements de versions qui confortent le caractère rusé et versatile du faux médecin de 32 ans qui a toujours su, selon les révélations de l’enquête, adapté sa spécialité au contrat proposé.

L’homme qui a confectionné la fausse carte professionnelle du «Dr Samba» arrêté

Les limiers de la Sûreté urbaine ont également mis aux arrêts, hier lundi, le gérant d’un cyber multiservices, qui a pignon sur rue à la Médina. Il lui est reproché d’avoir confectionné la fausse carte professionnelle au faux médecin Amadou Samba en parfaite connaissance de son acte délictuel.
Auditionné hier lundi, le gérant de ce cyber multiservices sera à nouveau entendu aujourd’hui et probablement confronté au «Dr Samba». Selon les sources de «L’Observateur», il ne sera pas le seul à être confronté à Amadou Samba, ce mardi. Près d’une dizaine d’infirmiers qualifiés feront face aujourd’hui aux les limiers de la Sûreté urbaine de Dakar. Ces blouses blanches ont été, de 2017 (date référence de ses manœuvres frauduleuses) à nos jours, employés de manière ponctuelle par le «docteur» Samba pour divers types de prélèvements. Ces infirmiers identifiés ont tous accusé réception de leur convocation.

Les agents qui avaient été testés au Coronavirus par «Dr Samba», déclarés négatifs par l’Institut Pasteur

La seule bonne nouvelle d’hier lundi porte sur l’état de santé des agents identifiés qui avaient subi des tests (sanguins) de Coronavirus de la part du «Dr Samba». «Ces agents ont été à nouveau soumis à des tests de Covid-19 par l’Institut Pasteur et tous les tests sont revenus négatifs», confirment les sources de «L’Observateur». D’après ces personnes très au fait de cette rocambolesque affaire qui secoue le pays, l’enquête a quasiment été bouclée et Amadou Samba devrait être déféré au parquet de Dakar pour faux usage faux, escroquerie, mise en danger de la vie d’autrui et pratique illégale de la médecine. «Un chapelet d’infractions, nous souffle-t-on, qui pourrait s’allonger au regard de l’analyse des derniers éléments du dossier.»
A. DIEDHIOU

Des virements de la Rts effectués dans le compte de Medicalis, la société de «Dr Samba»

C’est un mécanisme très huilé que Amadou Samba avait mis en place pour réussir ses coups. Nombre de sociétés et entreprises sont tombées dans le panneau, dont la Radiodiffusion télévision du Sénégal (Rts). D’après les informations de «L’Observateur», le faux médecin était lié avec la Rts dans le cadre d’un contrat dûment signé avec sa société dénommée Médicalis. D’ailleurs, le mis en cause a eu à encaisser, au moins à deux reprises, des chèques de la Rts de 1 et 5 millions de FCfa. Les virements ont été effectués dans le compte de Medicalis ouvert dans les Livres de la Banque of Africa (Boa).

Comment le faux médecin a utilisé l’entête de la Clinique Naby de Rufisque

Le Docteur Moustapha Bâ, propriétaire de la Clinique Naby de Rufisque, a eu la surprise de sa vie vendredi dernier. Convoqué à la Sûreté urbaine de Dakar, les enquêteurs lui ont présenté des documents portant l’entête de sa Clinique avec la signature et le cachet de «Dr Amadou Samba Bâ» apposés au bas du documents. Ceux-ci ont été saisis chez le faux médecin lors de la perquisition effectuée à son domicile. Pis, lors de son audition, «Dr Samba» avait déclaré aux limiers être le propriétaire de la Clinique Naby où il avait fait un court stage, il y a trois ans. Mais, il finit par être confondu au cours de sa confrontation avec le vrai propriétaire. D’ailleurs, d’après les éléments de l’enquête, Dr Moustapha Bâ a déclaré qu’il va se constituer partie civile dans cette affaire. Il devrait même retourner devant les enquêteurs ce matin.

ABDOULAYE DIEDHIOU

IGFM

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