Suppression du système de parrainage : « La CEDEO omet le caractère non discriminatoire de la loi sur le parrainage » (Stéphane Ndione)

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Dans un arrêt rendu public le 28 avril, la cour de la justice de la CDEAO a souhaité que le système de parrainage voté pour les présidentielles de 2019 puisse être supprimé. Une question qui ne cesse de faire polémique depuis quelque temps. Ce, Stéphane Ndione, professeur dans les universités privés du Sénégal, livre son analyse, dans Sunubuzz. Il estime qu’il y a beaucoup de contradictions dans les motivations du juge communautaire (CEDEAO).

L’euphorie des acteurs politiques surtout du camp de l’opposition et de la Société civile se sentait de tour bord suite à l’annonce de la décision de la Cour de Justice de la CEDEAO sur le recours introduit par l’Union Sociale Libérale pour violation de la libre participation par le biais de la loi sur le parrainage.

Certes cette décision conforte l’image encore la respectabilité de la juridiction communautaire mais suscite dès sa délibération une incertitude sur les échéances électorales à venir.

Est-elle une décision confirmative teintée de contrariété de motifs ? 

Ce n’est pas une première pour la Cour de Justice de la CEDEAO de rendre des décisions relatives au contentieux électoral. Bien vrai que ses compétences soient très restreintes au fond de par le cadre normatif qui le définit mais aussi par mesure de prudence à l’égard de la souveraineté de ses États membres.

On ne doit pas être alors surpris de cette décision du fait qu’elle vise la protection des droits politiques des candidats aux élections et non la certification ou la validation de la réélection d’un Président encore moins son invalidation.

Sur ce, il faut alors comprendre au regard de cet arrêt, c’est le rôle du juge communautaire protecteur des droits et libertés fondamentales des individus qui était mis en exergue. Et dans l’ossature des droits humains, les droits politiques en font partie.

Cette décision vient confirmer celle rendue sur la plainte formulée par les partis de l’ex-majorité contre l’Etat burkinabè à l’effet de statuer sur précisément l’article 135 du nouveau Code électoral, qui rend inéligibles aux prochaines élections, les personnes ayant soutenu la modification de l’article 37 de la Constitution. La Cour avait « dit que le Code électoral du Burkina Faso, tel que modifié par la loi n°005-2015/CNT du 07 avril 2015, est une violation du droit de libre participation aux élections » et « ordonnait en conséquence à l’Etat du Burkina de lever tous les obstacles à une participation aux élections consécutifs à cette modification ».

Mais en tout état de cause il y a beaucoup de contradictions dans les motivations du juge communautaire comme c’est le cas lorsqu’il ne cautionnait pas le caractère non discriminatoire de la loi sur le parrainage. À cela s’ajoute l’attitude audacieuse du juge d’outrepasser même ses compétences en contestant implicitement la décision du Conseil Constitutionnel du Sénégal ce qui n’est pas de son ressort.

Doit-on supprimer ou modifier le système de parrainage ?

Cette ordonnance mérite une interprétation singulière pour éclairer sur la lanterne des choses et donner un sens aux attentes de la Cour

En effet, il convient de lever des équivoques sur les manipulations par l’usage d’un  linguistique pas du tout adapté en l’espèce.

Nulle part dans la décision, il est question d’abrogation de la loi sur le parrainage mais plutôt de suppression de la méthode utilisée pour valider la candidature des pressentis aux présidentielles par une collecte de signatures sur l’étendue du territoire. Soit la cour manque de courage pour ordonner l’extinction de la loi, soit elle baigne dans le tâtonnement ou la précipitation.

Ceci dit, de tous ceux qui avaient annoncé leur candidature, étaient contraint de trouver le maximum d’approbation populaire pour faire passer leur dépôt. Et de par le système utilisé c’est à dire le nombre de signatures demandées et l’inégalité sur le poids électoral entre postulants, beaucoup se sont vus lésés dans la libre participation aux élections présidentielles.

Le libre exercice de ce droit politique ne doit pas en principe être entaché par des manœuvres tantôt justifiées par des raisons financières, tantôt par une tentative d’écarter de potentiels candidats sérieux aux élections.

On peut comprendre que dans l’interprétation et les motivations, le sentimentalisme, la raison et le bon sens n’avaient pas inspiré voire même influencé le juge communautaire qui s’est juste contenté de la violation d’un droit politique alors que compte tenu des réalités du processus électoral en Afrique de l’Ouest et les tendances capricieuses de la démocratie africaine où chacun peut inconsciemment se déclarer candidat aux joutes électorales sans pour autant penser les fonds colossaux alloués pour son organisation dans un pays où on compte plus de 300 partis politiques sans oublier l’utilisation de ces partis pour des financements illicites.

Qu’elles sont les retombées de la décision ? 

Si l’on s’en tient à l’effet immédiat de la décision et le délai imparti de 6 mois pour changer le système de parrainage, un autre dialogue politique devra voir le jour les mois à venir.

De concert avec la société civile et l’opposition concernés devra :

– Lancer la procédure de modification de certaines dispositions de la loi sur le parrainage et non son abrogation

– Consulter les acteurs politiques pour trouver un consensus sur la nouvelle méthode de parrainage ce qui peut faire des mois

– Valider ce processus par un rapport qui débouchera sur un projet de loi.

Les conséquences ne se limiteront pas seulement sur l’aspect juridico-politique de la loi sur le parrainage mais sur le plan économique ; il faudra faire des prévisions plus ou moins risquées si nous avons que l’opposition et le pouvoir en place auront du mal à trouver un consensus sur le parrainage des candidats aux élections locales où c’est plus complexe que les présidentielles.

En somme, l’objet de la décision présente un imbroglio sur la nécessité d’abroger la loi ou de modifier la pratique du système de parrainage afin de permettre à tout un chacun de jouir et s’exerce librement son droit de participer à une élection même si dans le contexte actuel et à travers la conjoncture socioéconomique tout le monde ne peut pas prétendre à un mandat électif. Il serait judicieux de procéder par une démarche inclusive et sincère sans calcul ni refus de coopération pour le bien-être des sénégalais.

In fine les supputations sur la légitimité n’a pas sa place dans ce cas d’espèce.

SUNUBUZZ !

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